C’est un rendez-vous que le Printemps a inauguré l’an dernier. Un parcours de comédien, comme il y a d’érudits parcours littéraires ou de réjouissantes routes des vins. En 2012, Patrick Pineau ôtait son nez de Cyrano pour venir s’ébrouer dans Vol en piqué, joyeuse pochade, mi-théâtre, mi-cabaret. Cette année, c’est Nicolas Bouchaud qui envoie par-dessus les cyprès la perruque d’Alceste pour endosser les habits d’un médecin de la campagne anglaise.
Nicolas Bouchaud n’est pas un novice dans ce genre de performance qui donne à entendre un texte nullement écrit pour le théâtre. Il y a deux ans, le Printemps avait accueilli La Loi du Marcheur, long monologue, drôle et virtuose, construit sur les dialogues qu’ont entretenus le critique de cinéma Serge Daney et l’essayiste Régis Debray.
Un métier idéal prend son matériau dans le journal d’un médecin de campagne installé dans une région d’Angleterre que l’on peine à imaginer aussi sauvage. Et pourtant, c’est là qu’il exerce, par choix, par misanthropie peut-être, lui qui en a tant vu comme chirurgien de guerre.
Pendant deux ans, l’écrivain John Berger l’a suivi et c’est lui qui a compilé cette effarante somme d’anecdotes, de bouts de vie parfois cruels, parfois hilarants où Nicolas Bouchaud et son metteur en scène Eric Didry ont puisé. Inutile de dire que Bouchaud, passant des salons Louis XIV à la campagne anglaise, est magistral. On retrouve là ce qui faisait déjà sa force dans La Loi du Marcheur : au premier mot prononcé, il captive. Grâce de l’acteur…